Abstract:
Introduction
Cette thèse vise, en premier lieu, à décrire l’usage des temps verbaux du swahili de
manière plus précise. En second lieu, elle se propose de mettre en lumière quelques points de
comparaison pragmatique entre les morphèmes temporels du swahili et les temps verbaux du
français. Commençons par le premier objectif.
Les descriptions classiques et modernes sont soit parcellaires soit erronées, comme nous
le verrons au chapitre consacré à leur présentation critique. A titre d’exemple, Waihiga
(1999), entre autres auteurs, observe que le morphème –na- en swahili ne sert qu’à décrire une
action qui se déroule au moment de la parole. Certes, le morphème remplit ce rôle mais il a
d’autres valeurs. Nous montrons que –na- peut également décrire un événement passé ou
futur, un événement habituel et une vérité générale (valeur gnomique) du genre la terre tourne
autour du soleil. Ici, nous avons affaire à une description parcellaire.
Par ailleurs, Crozon & Polomack (1992) font l’hypothèse que le morphème –li- du
swahili correspond à l’imparfait du français. Or, notre analyse montre que seul l’imparfait
d’atténuation correspondrait approximativement à certains usages de –li-. On voit que la
description de Crozon & Polomack n’est pas sans intérêt mais la généralisation induit
facilement en erreur. De surcroît, les exemples proposés à l’appui s’avèrent problématiques
car ils se traduiraient avec le passé composé du français et non pas avec l’imparfait. C’est le
cas de nilifanya, nilijibu et niliandika (respectivement j’ai fait, j’ai répondu et j’ai écrit)
critiqués au § 2.7. Bref, les descriptions sont à compléter et à amender.
Comment expliquer cet état de choses ? Premièrement, nous faisons l’hypothèse que le
cadre théorique qui inspire les descriptions classiques et modernes du swahili est inadéquat et
donc mal adapté à la besogne. Nous nous expliquons. Bon nombre d’auteurs classiques et
modernes s’évertuent à proposer un et un seul usage d’un temps verbal. Dans cette optique, un
temps verbal est doté d’une sémantique stable et invariante. Comment alors expliquer les 5
usages de –na-? Beaucoup d’auteurs préfèrent ne pas en parler.
Le deuxième problème lié au cadre théorique est le suivant: pour décrire un même
événement le locuteur swahili, dans certains contextes, peut choisir entre deux morphèmes.
C’est le cas de –me- et –li-. Comment est-ce possible si un morphème n’avait qu’une seule
sémantique unique à lui-même ? De même, il est malaisé de dire pourquoi le locuteur
choisirait entre les deux morphèmes